J'ai rencontré Elsa Guillaume lors de ma mission à l'Institut Culturel Bernard Magrez où elle a été en résidence pendant trois mois. Née en 1989 à Carpentras, elle est titulaire d'un diplôme national supérieur d'arts plastiques aux Beaux-Arts de Paris. Elle a obtenu le prix COAL en 2015 qui lui a permis de vivre une expérience fantastique : partir un mois durant en résidence sur le bateau d'expéditions Tara dans le cadre de sa mission "Les récifs coralliens face au changement global de la planète".
YAR : Comment définirais-tu ton travail ? Je parlais justement de "strates" tout à l'heure, et c'est ainsi que j'aime voir les choses. Formellement, il s'agit de volumes et de dessins : beaucoup de céramiques, des formes découpées, des lignes. Dans une première strate, il y a cet attrait pour les lieux inexplorés, les récits des découvertes et des expéditions, jusqu'aux documentaires actuels. Dans mon travail, l'on repère bien l'importance de l'océan, des abysses et autres créatures marines. J'y puise beaucoup de formes et inspirations, mais il y a aussi les îles lointaines, les hauts sommets, les jungles impénétrables ou encore les pôles glacés qui me stimulent et agitent ma curiosité. En seconde "strate", il y a la fragmentation, le découpage des éléments. Cela évoque autant la dissection, cette envie d'aller voir ce qu'il y a à l'intérieur des choses, que la nourriture, et comment l'humain s'alimente. Je m'intéresse autant aux chaluts de pêche qu'à l'anthropologie. Cela peut sembler être un grand écart et pourtant, je trouve que tout est lié. Il s'agit du monde qui nous entoure, que j'essaie de décrire à ma manière, avec de l'humour, parfois noir, et aussi de la tendresse, de la légèreté.
Mais il y a aussi en seconde lecture, l'évocation de la pêche illégale des ailerons. Sauvagement découpés, nombreux requins et raies sont rejetés en mer encore vivants, et coulent déaileronnés vers leur mort certaine. Cela alimente une économie absurde où des croyances thérapeutiques priment sur des êtres vivants. YAR : Quels sont les artistes contemporains qui t'inspirent ? En voici quelques uns : Quentin Blake, Johan Creten, Bill Viola, Nick Cave, François Schuiten, Kristin Mc Kirdy, Jockum Nordström...
YAR : Un conseil culture ? Un livre qui m'a marquée récemment, c'est Petit Pays de Gael Faye. C'est très beau, fort et résonne particulièrement avec l'actualité. Cela fait deux mois que je ne suis pas en France, donc pour une exposition récente, difficile ! Avant de partir, j'ai vu au Musée Guimet celle sur les cartes asiatiques, magnifique ! Et comme tous, je regrette que la Maison Rouge ferme. J'y ai vu tellement d'expositions et collections qui m'ont marqué... YAR : Un conseil pour les jeunes artistes ? Rester soi-même, être curieux, énergique, suivre son intuition. Garder le cap et prendre des risques. Interview mené par Livia Perrier Quelques liens https://elsaguillaume.com/ Backlash Gallery Prix Coal Crédit photo Portrait : Géraldine Guillaume La section commentaire est fermée.
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